Pierre Fatumbi Verger du Regard Détaché à la Connaissance Initiaque, de Jérôme Souty Photographe en rupture de ban et voyageur au long cours, Pierre Verger (1902-1996) est devenu ethnologue, botaniste, historien. À partir de 1946 et jusqu’à sa mort, il a consacré cinquante années de recherches aux cultures noires du Brésil et d’Afrique (Nigeria, Bénin), au monde transocéanique des orixás et des voduns. Il fut initié au candomblé à Salvador de Bahia, à la divination d’Ifá en pays yoruba (où il renaquit symboliquement sous le nom de Fatumbi), ainsi qu’à plusieurs sociétés secrètes. Homme de l’image initialement très méfiant envers l’écriture, il finit par rédiger des sommes ethnographiques pour montrer la richesse et la spécificité de ces cultures de l’oralité. L'ouvrage, distribué en dix chapitres thématiques, compte 140 photographies de Verger choisies par l'auteur. Il est préfacé par Jean-Paul Colleyn. - Maisonneuve & Larose - Février 2007 - 517 pages - ISBN : 978-2-7068-1983-4 Prix : 34 € Pierre Verger, jeune homme de bonne famille né en 1902, ami des amis de Prévert, devint, dans les années 1930, un grand voyageur et un photographe très doué, avant de poser ses pénates à Salvador da Bahia (Brésil) et de consacrer le reste de sa vie à l’étude rapprochée du candomblé brésilien et des cultes initiatiques africains. Ce résumé ne rend évidemment pas justice à la biographie fouillée que lui consacre Jérôme Souty. La vie de Pierre Verger, disparu en 1996, a été atypique, tant il parvint à se maintenir sur l’arête étroite qui sépare l’observateur du dévot, le compagnon du croyant. Ami de Roger Bastide et d’Alfred Métraux, Pierre Verger s’attira l’estime des milieux de la recherche, vécut en partie de financements scientifiques, sans se plier à la discipline universitaire. Il écrivit beaucoup, mais pas sur ce qu’il jugeait indiscret de révéler. Amoureux de Bahia et de l’Afrique de l’Ouest, il y passa le plus clair de son existence, s’initiant aux mythes, à la divination et aux cultes afro-américains. De son œuvre, deux aspects méritaient au moins d’être examinés, et J. Souty leur consacre de nombreuses pages. D’abord, le travail de P. Verger est tourné vers la mise en valeur des racines africaines, et plus précisément yorubas, des cultes candomblés et de la santeria cubaine. Cette filiation, aujourd’hui revendiquée par les adeptes, passe de nos jours pour une de ces traditions reconstruites tendant à estomper les métissages connus par ces cultes recomposés au xxe siècle. Vient ensuite la question de la posture de l’observateur?: beaucoup plus que simple participant, P. Verger fut un véritable initié, même s’il ne céda jamais à la transe qui le fascinait. Devenu une figure sacerdotale à Bahia, il garda pour lui ce qu’il estimait appartenir au secret, et forcément déçut les attentes des anthropologues. Quelle leçon tirer de cette vie de transfuge culturel?? J. Souty ne cache pas sa sympathie pour la démarche engagée de P. Verger. Il approuve cette mise en danger de soi, ce dépouillement théorique et cette recherche d’identité nouvelle qui ont guidé sa vie. Mais comment suivre un tel exemple?? Encore faudrait-il que les attentes qui, il y a un demi-siècle encore, entouraient les cultes de possession, l’Afrique profonde et les mystères de la transe puissent survivre à leur mise en spectacle et aux usages politiques qui les caractérisent aujourd’hui. http://www.ordiecole.com/photo/verger_pierre.html ______________________________________________________________________________ http://www.ordiecole.com/photo/verger_pierre_souty_jerome.txt