A la découverte de Maquis
Éléphant
Maquis
Éléphant. Un restaurant que les habitants de la Jonction
découvrent à peine. Ils connaissent ce lieu qui leur propose la
cuisine de l'Afrique de l'Ouest. Situé dans un quartier populaire de
Genève, Maquis Éléphant mérite une visite en ces jours de
fêtes. Reportage.
L'Ivoirienne Fini Anin Sophie est
de plus ce qu'il y a d'authentique en terme de beauté féminine
africaine. Un corps plein de vie. Une peau teint lumineux qui n'accuse
pas l'utilisation de produits cosmétiques. Certes, elle n'aime pas se
teindre la peau, mais elle ne peut pas se passer d'un maquillage
léger. La quarantaine sans complexe, elle a trouvé sa voie
professionnelle. En effet, Fini Anin Sophie est aux commandes
du restaurant Maquis Éléphant qu'on retrouve dans le quartier
de la Jonction, plus exactement au 10, rue du Village suisse à
Genève. Un décor soigné. 20 places assises déployées sur 70
m2. Du meuble en bois dur (875 kg du bois Uko), aux motifs
africains ramenés de la Côte d'Ivoire. Une ambiance exotique annonce
l'intérieur. Le dépaysement vaut la peine! Hommes et femmes se
croisent dans cette atmosphère paisible chaque semaine, de mardi à
dimanche. Les lieux sont ouverts les matins, de 10h00 à 14h00 et
chaque après-midi de 18 heures jusqu'aux heures tardives de la soirée.
Exceptés le lundi (fermés toute la journée), le Jeudi et le
Vendredi (fermés aux heures de l'avant-midi). C'est avec fierté
que Fini Anin Sophie affiche les saveurs quotidiennes
ivoiriennes et celles de l'Afrique de l'Ouest. Des recettes connues ou
qu'elle dégote dans ses souvenirs d'enfance, en fonction de la demande
de la clientèle. Chez Tantine Anin (pour les intimes), on peut avoir,
dans son assiette, une variété succulente d'ingrédients :
Attiéké, Alloco, Kédjénou, N'Foufou, Ayerto et Sauce gombo. La carte
de boisson exotique sans alcool est, elle, incitative :
gingembre, tamarin et bissap au choix. Les amateurs d'autres
cocktails sont aussi servis. Il y a de tout. Whisky, Vodka, Campari,
porto, etc... La suggestion de la semaine comprend toujours du
poisson, de la viande et du poulet livrés par quelques alimentations
africaines ou par le boucher suisse du coin.
Pouvez-vous
nous présenter, brièvement, votre carte de visite
? "Je suis native de Attinguie, tout
près d'Abidjan. Je ne viens pas directement du "milieu" ; je ne suis
pas une fille des commerçants. Je n'avais jamais fait de la
restauration. Aujourd'hui, je suis restauratrice. La cuisine
-africaine ou européenne- reste une passion vécue, parmi d'autres, dès
mon jeune âge. Ma première passion fut la dactylographie. J'ai
vingt-ans de présence en Suisse où j'ai élevé mes enfants, aujourd'hui
majeurs. J'ai travaillé dans différentes branches de métiers,
régulièrement auprès des personnes âgées. J'ai pris le temps d'élargir
ma formation dans les domaines d'aide-soignante et de secrétaire
médical."
Comment vous
est-il venue l'idée de vous orienter vers la restauration
? "Tout a commencé en 1998 sur des marchés
publics occasionnels. Je tenais un stand de mets africains un mercredi
ou un samedi. J'y proposais du riz au poulet à l'emporter. C'était un
travail difficile, particulièrement durant les hivers. Au fil du
temps, je m'étais achetée une remorque, plus pratique pour me rendre à
toutes les manifestations culturelles et artistiques ou aux fêtes de
Genève. En 2000, tout en assumant cette lourde tâche, j'ai commencé à
suivre différentes sessions organisées par un Centre de Formation sur
la préparation aux examens du certificat de capacité des cafetiers. En
fait, pour exploiter un restaurant, il ne suffit pas d'assurer des
bons contacts, d'avoir des petites attentions ou de satisfaire les
attentes des clients, qualités qui ne s'apprennent pas à l'école. Il
est impératif d'acquérir le b.a. ba du métier. Il faut avoir quelques
notions de la loi sur la restauration, l'organisation administrative,
la gestion d’exploitation, la comptabilité et tout ce qui se rapporte
à la cuisine. C'est une obligation, en Suisse, de passer par là
lorsqu'on projette de gérer une telle boîte. Oui, je l'ai fait au prix
de beaucoup de temps, de l'énergie et de l'argent. Il le fallait.
J'avais la volonté d'aller loin. Il y a eu des moments ratés. A force
de persévérance, j'ai fini par obtenir ma patente. Dans ma promotion,
nous étions trois femmes africaines dont une marocaine et une
éthiopienne. En 2002 j'étais obligée de tout arrêter. La remorque
devenait lourde. Je me débattais toute seule comme un homme. Mon mari
ne partageais pas ma passion. Il n'était pas
là."
Pourquoi
subitement cette résignation ? Était-ce le début d'une autre belle
aventure ? "Au contraire. Je ne voulais plus tirer la
remorque. Je pensais à autre chose. Je souhaitais m'installer à mon
compte. Je cherchais un bar-restaurant à reprendre. J'avais laissé
tomber toutes mes occupations subsidiaires. Je devais me concentrer à
cette recherche. Je pointais au chômage tout en ayant l'espoir de
monter ma propre affaire. Il fallait trouver le lieu idéal dans deux
quartiers dont la situation géographique en fait un lieu
exceptionnellement calme. Mon souhait était de trouver une place dans
les quartiers de Plain Palais et de Pâquis, qui
regorgent les bons restaurants de Genève. Je ne voulais pas aller très
loin. Ce ne fut pas possible, ces lieux étant très sollicités par des
commerçants. J'ai fini par opter pour ce quartier de la Jonction : il
représente des avantages non négligeables. C'est un emplacement idéal.
Dans tous les cas, il importait de mieux se positionner sur le marché
de la restauration."
Peut-on
affirmer aujourd'hui que tout va bien ? Votre but a-t-il été atteint
? "Oui, le restaurant a ouvert ses portes le
27 septembre. Je l'ai désigné "Maquis Éléphant" par amour à
l'éléphant, aimé en Côte d'Ivoire et représenté dans les armoiries du
pays. Il m'a fallu batailler pour réussir. J'ai puisé dans mes
économies. Je suis une femme déterminée. Vous le savez, la vie
en Suisse n'est pas un cadeau. C'est un long cheminement parsemé
d'embûches. Au départ, je ne voulais pas vivre ici. J'ai rencontré mon
mari en Côte d'Ivoire où il travaillait en qualité de géomètre. Je
l'ai suivi en Suisse par amour, et non par opportunité. Une fois dans
son pays, il a changé de visage. Ma vie de couple n'a pas été du tout
rose. Je devais travailler dur pour nourrir ma famille. Les enfants
ont grandi. J'assure aujourd'hui mon autonomie. Enfin, je peux me
consacrer entièrement à mon travail. Je m'y sens épanouie avec cette
chance d'avoir des amis qui s'intéressent à ce que je
fais."
Comment Fini
Anin Sophie organise-t-elle sa journée ?
"C'est une journée chargée. En effet, je dois faire les
courses ; préparer les menus ; cuisiner en grande quantité ; assurer
le travail de nettoyage et d'autres petites bricoles. Il y a des
impératifs financiers, des factures à payer. C'est toute une
organisation qui exige audace, présence et énergie. On ne prend la
mesure de cette charge de travail que lorsqu'on est à la fois dans la
salle à manger et aux fourneaux ; lorsqu'on est à la fois gestionnaire
et créative."
Avez-vous un
regret ? "Pas du tout. L'expérience est judicieuse.
J'ai appris à travailler beaucoup; à avoir un esprit d'entreprise
dynamique et à mesurer la valeur du travail d'équipe. Sur ce plan là,
je ne me fais pas du souci. Seulement, je souhaiterais plus toucher
une clientèle africaine. Actuellement, je reçois plus d'Européens que
d'Africains. Je le sais, sortir et aller manger au restaurant ne fait
pas partie de notre culture. Nous préférons avoir nos invités au
domicile. C'est plus convivial. J'espère rendre prochainement cet
espace plus culturel : organiser des expositions d'objet d'art, des
rencontres entre artistes, pourquoi pas ?"
Propos recueillis par Cikuru
Batumike
Saveurs des îles, faim africaine en
Suisse
Des
spécialités culinaires afro-antillaises font découvrir des cultures,
d'une manière permanente ou épisodique, dans la presque totalité des
villes suisses. Où se restaurer ? Quelques pistes (liste non
exhaustive) : Gastronomie sénégalaise, chez Adama Sene,
livraison à domicile, tél. 022 740 46 81 ; au restaurant Diamant
noir, Technikumstrasse 46, 8400 Winterthur, tél. 052 202 29 47; au
Soulfood, Bernstrasse 11, 3045 Meikirch, tél.fax 031 822 07 74
; au restaurant exotique et créole La Lagune, route de Tivoli,
1468 Chegres, tél. 026 663 21 36 ; au Maquis Éléphant de
Genève, tél. 022 321 38 41 ; au restaurant Teranga :
spécialités sénégalaises, 38 rue de Zurich - 1201 Genève tél. 022 731
15 22 ; à La Corne de l'Afrique, 14 rue Ancien-Port, 1201
Genève, tél. 022 738 08 06 ; au village Africain de La Gazelle
d'or, spécialités culinaires d'Abyssinie (actuellement
Éthiopie et Erythrée), 55 rue de Lyon - 1203 Genève, tél. 022 340 33
50 ; au Couscous, restaurant oriental complété d'une large
offre de mets végétariens. Sa spécialité : le couscous et une
palette de mets orientaux ou classiques, le tout complété par
une variété de vin d'Afrique du nord et d'Orient, sise Rue Enning 2 -
1003 Lausanne, tél. 021.321.38.40 et à La case créole, fleur
de l'île Maurice nouvelle cuisine créole, tous les jeudis
(11h00-00h30) et tous les premiers samedis du mois (18h00-01h00)
: show, musique avec les danseuses de l'île : Les Caves, 24a, Rue
Haute, vieille ville de
Bienne. |